Monday, November 27, 2006

La sixième République est en marche




Choisir enfin

Ce n’est pas sans une certaine jubilation que nous accueillons l’investiture de Ségolène Royal, tant pour son caractère massif, que par sa dimension révolutionnaire.
Disons-le tout net, celle-ci nous rend justice sur nos choix- non pour s’en auto-satisfaire-, mais parce qu’elle nous conforte dans nos convictions fondatrices de Rénover maintenant. En désignant comme candidate celle qui incarne le changement, les militants socialistes ont bien sûr voulu signifier que la rénovation était le premier critère de leur positionnement. Autrement dit, ayant fait l’inventaire de l’actif et du passif des années passées, ils ont compris que pour changer de politique, il faut aussi changer la politique.

La victoire de la rénovation et de l'ancrage à gauche


De ce fait, le Parti socialiste tire enfin les leçons du 21 avril 2002 et crée les conditions de la victoire.
Cependant, elle nous enseigne aussi que, les militants ont voulu déplacer à gauche le centre de gravité du parti socialiste, retenant comme motivation le message destiné aux couches populaires de Ségolène Royal et son volontarisme, notamment sur la démocratie sociale ou encore l’éducation et les 35h analysés d’une clairvoyante lucidité sur la situation vécue par des milliers de salariés.
Au danger qui menace notre pays, sa république, son identité, le PS répond par la désignation d’une candidate qui affirme un élan révolutionnaire au service du peuple. C’est dire combien, en proposant de s’attaquer aux structures, aux outils de l’action politique, on peut faire renaître l’espoir dans un pays miné par l’affaiblissement et l’affadissement du politique ! Ainsi, nous briserons le plafond de verre qui sépare les privilégiés vivant de rentes de situation, des opprimés souffrant des injustices et des discriminations, avec les pierres de la colère.

Un enjeu historique !

Mettre une femme à la tête d'un pays c'est sans doute vouloir humaniser la politique, mais ce mouvement arrive massivement dans un monde en dégénérescence.
Face à la gravité des maux dont souffre la planète, l’ascension des femmes semble d’ailleurs inéluctable partout. Comme si, pour changer le monde, il fallait d’abord en changer la face tendant à celles (et ceux par là même occasion) qui se tarissaient dans l’ombre de la gouvernance mondiale politicienne, un micro pour mettre à jour leur vérité.

Doucement, mais sûrement

Mais prudence, nous avons fait un choix de raison il y a plusieurs semaines, ce n’est pas pour nous laisser griser par des certitudes sondagières du moment. Nous devons faire quelque chose d’utile à partir de cette raison bienveillante, en continuant de peser dans le débat d’idées au service du combat militant. Contre le libéralisme, les ravages de l’affairisme et du clientélisme de la droite, pour un autre système politique où les citoyens reprennent le pouvoir et dans lequel leurs représentants les écoutent enfin.

Avec Ségolène, la France est sur la bonne voie pour accomplir une double révolution ; culturelle et structurelle. C'est-à-dire une révolution démocratique.
Mais il ne s'agit pas non plus de nous contenter de slogans, dans un pays où l'espérance retrouvée ne tiendra qu'à un fil. Aussi, comme nous y invite le philosophe Marcel Gauchet dans Libération mardi 28 novembre, ne sacrifions pas la refondation doctrinale de la gauche (ni- ajouterais-je la rénovation des pratiques politiques) sur l'autel de l'électoralisme.

La possibilité de maîtriser enfin notre destin

Pourquoi, nous contenter de la décrire ? Nous pourrions désormais nommer les choses par leur nom, dessiner l'horizon. Ce qui est en train d’arriver d’une force irrésistible est l’avènement de notre désir le plus profond. Il tient dans une main la promesse que nous nous sommes faite au Mans, et, dans l’autre l’attente haletante de sa réalisation. Rien ne la retient plus maintenant.

La sixième République n’est donc pas une prière, fût elle laïque. C'est le serment républicain que nous nous sommes fait il y a longtemps. C’est l’espoir de la gauche. C’est la chance de France et de la démocratie.

Et surtout, c’est l’histoire que nous écrivons maintenant.

Friday, November 03, 2006

Un an après, jours tranquilles à Clichy?



*image du film "Banlieue 13" un scénario catastrophe, mais une fin heureuse..



Il y a Clichy et Clichy

Henri Miller se retournerait dans sa tombe si Clichy sur seine ressemblait à Clichy sous bois. Bien qu'étant élue de la première commune, rare ville socialiste des hauts de seine, je me retrouve souvent citée comme appartenant au conseil municipal de la seconde ville du 9-3, département où j’ai grandi et où se trouve toute ma famille encore aujourd’hui.
Je me souviens aussi qu’il y a un an tout le monde appelait la mairie, le service com' était débordé de tous ces journalistes qui confondaient les deux villes. Cela a valu un communiqué explicatif du Maire et des réunions de crise pour éviter que nos jeunes se prennent pour les caïds de l’autre rive.

Quand un numéro de département peut changer un destin …

Ayant fait un peu de chemin depuis le 93, je replonge ces temps-ci dans le souvenir d’une enfance baignée dans la mixité et les joies des cours d’école.
Si nos racines étaient plantées dans le béton, nous avions quand même encore l’espoir et le désir d'avenir quand nous étions à l’école. Tous mes amis, dont beaucoup étaient enfants d’immigrés partageant mes classes, croyaient un peu à l’égalité des chances, aidés en cela par les combats médiatisés comme la marche des beurs et les réseaux d’éducation populaire. Mais à l’heure où j'écris, la matraque et le contrôle au faciès ont remplacé l’école et le respect, la religion supplée la famille, la discrimination est généralisée, et beaucoup d’entre eux n’ont pas leur chance parce qu’ils n’ont pas la couleur de peau standard.
Si moi j’ai franchi le périph', beaucoup sont restés de l’autre côté du mur invisible qui sépare la banlieue riche de la banlieue défavorisée..

Les banlieues ont des doléances
C'est à eux que je pense en ce moment. La marche des banlieues et les cahiers de doléances ces jours-ci, soit un an après les révoltes, ont montré le prolongement citoyen et très engagé politiquement des jeunes issus des quartiers populaires. Cette fois leur parole n'a pas été volée, ils n'ont ni tutelle ni parti relais. Mais cela pose clairement la question du débouché politique concret de ce mouvement.
Que va t-il en être si ceux là ne font pas leur entrée à l'Assemblée nationale ? Il est clair que la question de leur représentation est posée pour faire porter la cause comme celle des révolutionnaires convertis en républicains plus tard. Il ne s'agit plus tant de faire élire des députés en fonction de leur territoire qu'en fonction de leur appartenance sociologique.
C'est la question de la représentation d'une minorité visible qui incarne une majorité d'exclus à laquelle nous devons répondre. Vite !


Pour se poser les bonnes questions, il faut trouver les bons interlocuteurs

Alors à Fouras cet été, j’ai eu l’occasion d’organiser au nom de « rénover maintenant » un atelier sur la pratique militante en banlieue. J’avais pensé à faire venir des représentants de Bondy Blog, du collectif devoirs de mémoires, ou encore le président de l’Association nationale des élus de banlieues (ANEB), ainsi qu’une jeune chef d’entreprise innovante dans le domaine de la lutte contre les discriminations. Cette table comprenait une première partie animée par les jeunes socialistes pour la rénovation (JSR) où intervenaient des acteurs institutionnels venus faire l’analyse des révoltes de l’automne 2005. Ceux-là avaient un regard militant sans aucun doute et partageaient notre vision mais l'on retrouve hélas souvent dans les tribunes des spécialistes de la statistiques dont la froideur des chiffres dissimule les vérités humaines. Bien souvent, ils théorisent l'échec des politiques publiques de la ville et prônent la discrimination positive et le comunautarisme.
Plus commode pour compter et gérer ses troupeaux d'électeurs..

"Un an après, rien n’a changé", disent-ils tous. Regardons les choses en face
Le Maire de Clichy sous Bois continue de se battre au sein même de sa propre famille politique dont les maires voisins refusent le passage du Tramway T4 dans leur ville pour désenclaver Clichy qui se trouve à 1h30 de la première université. Avec 55000 âmes Clichy n’a toujours pas de commissariat, ni Caisse d’allocations familiales, ni ANPE quand Clichy sur seine (quasiment autant d’habitants) bénéficie de tout cela, vidéosurveillance en prime pour un coût d’un million d’euros, afin de rassurer les bourgeois ! Dans notre département, Sarkozy a même décidé de faire couvrir la RN 13 qui devrait Neuilly pour assurer la paix aux riches aux du contribuable français pour un coût de 750 millions d’euros !
Et, tandis qu’on se demande encore où mettre les mineurs délinquants, tout ça donne envie de crier : "dehors les politicards" et "vive les élus et les citoyens qui pensent d’abord à servir la population au lieu de se servir eux mêmes".
Ainsi, la péréquation des richesses est en cause, le 92 est le département le plus riche de France, son PIB équivaut à celui de la Grêce or la plupart des maires ne veulent pas redistribuer les ressources provenant de la taxe porfessionnelle générée par les sièges sociaux d'entreprises, car ils baignent dans l'élecoralisme et refusent de provoquer le débat sur la redistribution des richesses qu'ils gèrent de façon quasi discrétionnaire pour leurs "clients". De la même manière, dans la ville dont Sarkozy fût le maire, on préfère payer pour ne pas ne pas respecter les lois obligeant à la constuction de logements sociaux qui permettrait la mixité sociale contre les ghetos. C'est dire si l'avenir de Clichy dans la Seine Saint Denis est lié à celui de son homonyme des Hauts de Seine !


Pour apporter les bonnes réponses, il fallait se poser les bonnes questions.

Des fois, je pense à ce maire qui fait face, appelle la jeunesse au calme, à l’engagement citoyen au lieu de la violence qui engagera le retour de bâton autoritaire de la droite. Je me demande à quoi il tient.
Des fois, je me dis que j’ai de la chance d’avoir fait partie des 3% d’enfants ou petits enfants d’ouvriers qui réussissent à avoir leurs diplômes à l’université. Et encore, j’ai eu de la chance avec ma chevelure rousse et mes yeux bleus.
Mais, tandis que la Sorbonne ouvre encore ses bras aux enfants des quartiers populaires au centre parisien, peu à peu la République ferme les services publics et se retire de nos banlieues.
Alors quoi, faut-il en sortir pour s'en sortir ?
Le risque de la favélisation des banlieues pauvres existe. Le cœur de l’électorat de la gauche vit dans ses lieux livrés à eux-mêmes. Toute une génération de trentenaires a déjà essuyé les pots cassés, et ceux qui suivent ne voient pas d’avenir. Le désespoir a rajeuni.
S’il en est ainsi en bas de la pyramide sociale, je me dis qu' il ne faut pas grand-chose pour que l’édifice s’effondre.

C’est un plan global, massif, mais aussi une révolution culturelle face à la violence véhiculée par nos médias, le cinéma, les films de plus en plus crus qui nous sont montrés qu’il faut mettre en œuvre.

Comme après la guerre, il faut reconstruire. Et quelle plus belle cause pour un vrai socialiste ?

Aussi, quand j’entends Claude Dilain parler de son Clichy sous Bois, je me sens comme une étrangère à Clichy sur Seine et plus socialiste que jamais. C’est fou comme alors l’envie me gagne de retrouver les miens.

Cela dit, les deux villes ont un point commun ; leurs habitants s’appellent les clichois, et non les clichiens.



PS: Clichy souffre aussi de ses clichés... pour changer aussi notre regard sur la banlieue et ouvrir grands les yeux sur ses beautés , nombreuses :
Voir l'expo sur "Clichy sans cliché"
http://www.clichysanscliche.com/index.php?option=com_akobook&Itemid=31